Chroniques

Yeah Yeah Yeahs Mosquito

On commence à le savoir, les Yeah Yeah Yeahs aiment prendre leur temps entre chaque disque. Ce Mosquito n’est ainsi que le quatrième album d’une carrière entamée en 2001. Un bilan sans doute révélateur d’une certaine lenteur dans la composition ou alors d’un processus d’enregistrement des plus laborieux. Mais le problème ici, c’est que ça s’entend tout au long d’un album tout juste plaisant, et surtout carrément désincarné. Il y a une moitié de titres pertinents, à la production riche (David Sitek, de Tv On The Radio, est toujours aux manettes) et où les stridences déposées à l’INPI par le groupe s’expriment en roue libre. Quant à l’autre moitié, c’est plus poussif, et on se dit que le tout aurait fini en face B de l’un des singles fut-il sortie il y a quelques années de ça.

« Sacrilege », par exemple, est l’archétype du single bien fichu mais qui sonne préfabriqué, avec les chœurs gospel de la fin et le refrain d’inspiration Eurythmics. Ailleurs, on entend le groupe plus intrépide des débuts. « These Paths » est assez hypnotique dans son genre, apparemment travaillée dans un désert du Texas sous la houlette d’un Dave Sitek bien décidé à traduire l’atmosphère angoissante du lieu. « Under The Earth » de son côté se montre particulièrement mélodique quand « Despair » semble faire figure de meilleur single du disque, seul titre en tous cas à venir titiller le statut des meilleurs hits de Karen O & co, « Maps » ou « Zero ».

Ailleurs, donc trop souvent, on a affaire à un album agaçant pour ses trop nombreuses plages faciles et un peu immatures. Il y a clairement des longueurs. Prenons le cas « Mosquito », la chanson-titre : que les trois compères se la jouent bobos-nerds à Brooklyn, passe encore, même si ça limite les possibilités de conversation. En revanche, difficile de supporter les trois minutes où Karen O qui scande qu’elle est un « moustique qui suce le sang en faisant bzzzz ». Doux Jésus. Même topo pour « Arena 52 » ou « Subway » qui souffrent du syndrome de la bien triste vacuité. James Murphy passe faire coucou sur « Burried Alive », comme pour boire un coup en after work, et on se console un peu avec les ballades d’ado attardée de Karen O telles « Always » (très joli morceau) et « Wedding Song ».

Bilan moins figue que raisin, donc. Un nouvel album suffisamment digne pour satisfaire les nostalgiques de Fever to Tell et d’un groupe qui a largement remisé son rock au placard : Nick Zinner et ses guitares ,pourtant caractéristiques du son du groupe, semblent jouer les seconds rôles tout le long. Mosquito est une locomotive juste suffisante pour promouvoir la tournée en cours mais au bout du processus, pas sûr qu’il revienne souvent dans les playlists ou qu’on en parle encore dans vingt ans. Ça ne semble pas être un objectif et c’est bien ça le plus triste.

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