Chroniques

Wooden Shjips Back to Land

Jusque là, Ripley Johnson était en quelque sorte une valeur sûre. À la tête des Wooden Shjips et de son side-project Moon Duo, il incarnait parfaitement le versant psychédélique de la florissante scène de San Francisco. Pour Back To Land, le dénommé Johnson nous promettait pas mal de changement, avec un déménagement à Portland impliquant que cet album soit le premier enregistré loin de la terre natale des Wooden Shjips. Paraîtrait également que le groupe a décidé de laisser davantage s’exprimer ses vieilles influences classic-rock (d’où cette pochette). À l’écoute de Back To Land, on se rend compte que Johnson et ses gars ont surtout décidé de se payer la tronche du monde.

Après West, sorti en 2011 en compagnie de nos amis du jour et Circles avec Moon Duo l’année suivante, on était pleinement en droit de penser que Ripley Johnson en avait suffisamment dans les chaussettes pour nous pondre quelque chose d’un niveau égal ou supérieur à ces deux réussites. On se rend vite compte (vers la moitié de la deuxième piste) que Back To Land n’est qu’un gros plantage général. On ne tient là qu’un gros morceau d’une quarantaine de minutes oscillant entre l’ennuyeux et le barbant.

Ce qui nous ramenait toujours vers Ripley Johnson auparavant, c’était le côté ultra-répétitif de ses morceaux : une rythmique hypnotisante servait de base à chaque titre, à laquelle venait s’ajouter une nuance, puis une autre et cætera jusqu’à former un joyeux bordel psychédélique dégageant presque quelque chose de mystique. Pour résumer, il semblerait que Ripley aime beaucoup appuyer sur la touche « replay ».

Voilà voilà. Le souci c’est qu’ici, cette « rythmique hypnotisante » semble être la même sur l’ensemble de l’album. Ripley Johnson agit comme un ado à qui l’on vient d’offrir une nouvelle pédale d’effet, qu’il décide d’utiliser sur toutes ses compositions histoire de leur donner une certaine dimension « space rock », pourtant pas nécessairement rebutante de prime abord, mais qui devient sérieusement fatigante au bout d’un quart d’heure. Les seules « nuances » apportées aux morceaux ne sont que les chants fatigués de Johnson, franchement pas en forme sur ce coup-là. Ce à quoi viennent s’ajouter des solos de guitare peu inspirés, quelque part entre un disque Nature & Découverte et les passages ringards que les « shredders » type casent dans le morceau lorsqu’ils veulent transmettre un semblant d’émotion.

Plus concrètement, on peine sérieusement à extirper le moindre morceau de cet album (ou même à dissocier les uns des autres, en fait). Il y aurait peut-être le premier titre, éventuellement, puis le dernier, tous deux corrects. « Back To Land » tient le coup grâce à une mélodie plutôt efficace, tandis que « Everybody Knows » ravive un peu l’idée que l’on se faisait des Wooden Shjips il y a quelque temps encore. Sur chaque titre de West les guitares dégageaient une puissance inouïe. Après avoir baissé le son de leurs amplis sur Back To Land, ces gros fainéants retrouvent enfin leur jeu de guitare, mais c’est déjà trop tard.

En espérant que cet album ne soit qu’une erreur de parcours pour les Wooden Shjips, un disque de flemmard dû à un trop plein de confiance. Si ce bougre de Johnson avait jusque-là réussi à nous captiver par le caractère répétitif de sa musique, ce coup-ci il nous donne juste envie de tirer sur sa grosse barbe.

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