Il y a quelques jours, Solange (petite soeur de Beyoncé donc, ça c’est fait) se laissait aller à une bien jolie contre les méchants journalistes pas tendres avec le dernier album de sa copine Brandy (qui est une bien belle bouse, mais là n’est pas vraiment le sujet).
Avec une requête : arrêtez de penser que le R&B n’est devenu “intéressant et expérimental” que l’année dernière. On va essayer, chère Solange. Sauf que, ironiquement, ta carrière n’est devenue réellement “interesting and experimental” qu’en 2012. Quand, après deux albums gras du cul (avec Timbaland à la prod sur le premier et Mark Ronson sur le second, rien de bien étonnant) et peu rentables, tu décidas d’apprendre par coeur “Devenir une pop star internationale en dix leçons” en commencant par la fin. Comprendre : d’abord viser les étoiles, les stades et les charts, pour ensuite s’acoquiner avec l’underground sexy du moment, qui ne vendra pas plus de disque que le beau frère (Jay-Z, si vous suivez) n’a de bagnoles de collection dans l’un de ses dix garages. Malin, en tout cas sur le papier. Et, au moins l’espace de quelques semaines, salement accrocheur.
Car ce single, “Losing You”, est l’une des plus belles réussites de 2012. Sobre, romantique, délicatement produit par Dev Hynes, laissant ici libre cours à son amour pour les années 80 (on peut presque y entendre du Toto) bien digérées. D’ailleurs, Hynes fera EXACTEMENT la avec Sky Ferreira, mais c’est encore une autre histoire.
Ta voix, ici, n’est pas écrasée par les synthés et les effets tape-à-l’oeil de tes précédents efforts. Non. Tout ici transpire la classe, l’aisance et la beauté. Il ne restait plus qu’à en pondre une petite douzaine de cet acabit, et le tour était joué.
Sauf que non. Déjà, tu décides de jouer la carte de la sécurité, en annonçant la sortie de “True”, qui n’est “ni un LP, ni un EP”. Un disque donc, une collection de chansons. Sept au total, pour une trentaine de minutes. Sur ces trente, en quelques écoutes et un calcul rapide, on arrive à la conclusion que seules les trois premières valent réellement la peine que l’on s’y attarde. Pas de bol, c’est déjà fait, puisqu’il s’agit de “Losing You”, encore et toujours. Pour le reste, rien à dire. Mais vraiment, rien à dire, tant tout est sympa sans plus, tout sonne pareil mais pas non plus totalement. Usons du dictionnaire des synonymes : les mélodies sont parfois amoureuses (“It Never Seems To Fucking Work”), languissantes (“Lovers In The Parking Lot”) ou sybarites (oui, sybarites) sur “Look Good With Trouble”. Retournant dans tous les sens ses histoires de coeurs brisés (broyés, détériorés, féndillés), Solange, pourtant bien épaulée (l’ancien Test Icicles à la prod donc, mais surtout un label, Terrible Records, appartenant à un Grizzly Bear), tourne en rond. Aurait-elle tout dit en une chanson ? Possible (concevable, contingent, envisageable, éventuel, plausible, probable). Reste que tout n’est pas à jeter ici. Quand la belle abandonne son costume de Cendrillon pour celui de Cruella, cela donne “Locked In Closets”, belle surprise au goût plus relevé que le reste, où le chant se fait plus sanguin, se rapprochant de la hargne d’une M.I.A. C’est peu pour une carrière, mais sans doute suffisant pour la crédibilité.