Difficile de savoir qui se cache derrière le dénommé . On peine à trouver l’ensemble de son œuvre sur le net, si bien qu’il faut finalement se rabattre sur du label qui l’héberge, Cath Records, pour y trouver la majorité des chansons de l’écossais (dont l’excellent album Generation Scum). On y apprend que The Perception Game est sa troisième sortie sur ledit label, dans la foulée d’un album composé d’une soixantaine de titres, Effluvial Juggernaut – qui s’apparente davantage à un long enchaînement de démos, en réalité. En fouillant un peu plus, tout ce que l’on peut finalement apprendre sur Sean Armstrong, c’est qu’il officie au chant au sein des Yawns, un groupe dont on ne sait pas non plus grand chose si ce n’est qu’ils sont originaires de Glasgow et que leur garage-pop afière allure. Mais ce n’est pas tant ce flou autour d’Armstrong qui lui confère cette aura mystérieuse mais bien son nouvel album, The Perception Game, qui semble tout droit sorti du cerveau d’un sacré illuminé (le genre de cerveaux qui peut trouver cool d’utiliser du Comic Sans Ms et des effets visuels Paint sur sa pochette d’album).
On tient là en effet un objet pas si simple à appréhender, tout d’abord de par son ampleur : dix-huit titres, ce n’est pas évident à ingurgiter, d’autant plus que l’on à faire à quelque chose d’on ne peut plus brouillon. Mais si l’on parvient à passer outre cet aspect parfois excessivement DIY à l’écoute du disque, on ne peut qu’en ressortir le cœur tout ramolli.
Des titres tout à fait accessibles et parfaits de bout en bout, il y en a finalement assez peu dans cet album. The Perception Game (cliquez sur la pochette en bas de page pour écouter l’album) ne brille pas non plus par sa cohérence puisque cet enchevêtrement de chansons, aussi jolies soient-elles, est un brin foutraque. Le seul véritable single potentiel est « Bright Review », qui ouvre l’album : c’est accomodé de bien peu de choses, mais suffisamment pour être des plus touchants. Par la suite, chaque morceau semble contenir en lui des preuves du potentiel qui émane d’Armstrong. On y dénote toujours un élément prompt à vous mettre dans tous vos états, que ce soit à travers une poignée d’accords débiles (« I Feel You More Than the World Right Now », « Drag ») des expérimentations instrumentales distordues et anxiogènes s’apparentant à la bande-originale d’un film glauque (« The City Is Full Of Dragons », « Laughing Away ») ou tout simplement une jolie mélodie (mais là on ne vous citera pas de morceaux puisque cela reviendrait à recopier la tracklist).
Une foule de références vous viendront à l’esprit. On pense évidemment à ce vieux foufou de Daniel Johnston, avec qui Armstrong partage cette même approche de la compo et, sans doute, ce petit côté illuminé. La ressemblance atteint son paroxysme sur « Kite How Far », tire-larme d’à peine deux minutes qui n’est pas sans rappeler le magnifique « Some Things Last A Long Time » de Johnston. Parmi les références plus récentes, on pense à Jackson Scott, Orval Carlos Sibellius (cette voix chevrotante sur « While You Were Dancing ») ainsi qu’aux élucubrations de Connan Mockasin lors des passages les plus « expérimentaux » de l’album.
En définitive, ce qui ressort de The Perception Game, c’est surtout ce potentiel assez génial : on ne peut pas rester insensible face à des mélodies si touchantes et inspirées. Sean Armstrong semble avoir tout ce qu’il faut dans les doigts et la caboche pour élever des mélodies qui tombent toujours juste. Alors que ce soit avec The Yawns ou en solo, on ne peut attendre qu’avec hâte les prochaines babioles auditives qu’il aura rapiécées sur son radio-cassette pour enfant.