Chroniques

Pendentif Mafia Douce

Nous sommes en 2013, et l’excitation est retombée. L’excitation autour d’une nouvelle scène osant se réapproprier un chant en français et une certaine vision de la pop anglo-saxonne. Il y a un an, les albums de Lescop, Aline, Granville et La Femme figuraient parmi les plus attendus. Réussite artistique (relative) et échec commercial (relatif). Mais là où le web et la presse s’emballaient pour ces artistes, il n’en est rien ou presque pour ceux que l’on pourrait qualifier de deuxième vague de ce « phénomène » récemment disséqué par nos petites mains. Ainsi, la sortie du premier album de Pendentif se fait dans un quasi-anonymat.

Pendentif, c’est le groupe mignon par excellence. L’EP sorti en 2011 offrait des mélodies toutes jolies et des textes tout fleur bleue. Pas de procès d’intention ici : il n’y a pas de sujet plus noble qu’un autre en musique, et l’amour a toujours été l’une des principales préoccupations des musiciens de toute époque et de tous genres. Cet EP était même franchement réussi. Des quatre morceaux qui le composaient, trois se trouvent sur l’album, et constituent le cœur de ce Mafia Douce.

La formule Pendentif n’a pas changé d’un iota depuis 2011 : guitares légères, production réduite à son minimum, et la voix de la délicieuse Cindy Callède sur le devant de la scène. Une formule simple mais qui fait mouche, que l’on pense à « Riviera », au Metronomyen « La nuit dernière », à « Pendentif » ou encore au délicieux « Embrasse-moi », proche de la surf-pop des new-yorkais de The Drums. Tout cela est frais, parfait pour les vacances d’été (on est en septembre ? Ah, merde), tellement léger que certains titres semblent avoir été enregistrés pendant un live, avec une chanteuse à même d’ambiancer la foule, ce qui donne une véritable énergie à ces titres. Ou, dans l’autre sens, au cours d’une soirée karaoké dans un camping du Languedoc (« Panache », beaucoup trop kitsch). On pourra regretter aussi que parfois, lorsque le guitariste Benoît Lambin double la voix de Callède, les paroles se noient dans cet écho. On pourra aussi regretter que ce ne soit pas le cas sur certains titres.

Car deux morceaux méritent un carton rouge : « Jerricane » et « Mafia Douce ». Utiliser des métaphores toutes mignonnes pour parler d’histoires de cœur, passe encore c’est de la pop. Mais si on passe totalement à côté du délire de « Jerricane », de ses horribles chœurs, de son simplisme insultant, le morceau-titre nous hérisse encore plus les poils, dégoulinant de gnan-gnan et de bons sentiments. La mélodie est pourtant efficace, mais quiconque a traversé l’adolescence trouver difficile d’accrocher à ce que les bordelais racontent.

À côté de ces deux plantages, subsistent surtout quelques beaux motifs d’espoir. « Boulevard du crépuscule », qui rappelle furieusement Lescop, et « Voltige », démontrent les qualités du groupe lorsqu’il s’agit d’écrire de simples ballades. « 1er Juillet » est un véritable morceau attrape-cœur, alors que « Ondine » montre plus clairement le travail d’Antoine Gaillet à la production, en se rapprochant de sonorités plus électroniques, dans la veine de son travail avec M83. Alors oui, ce Mafia Douce est un bon disque, non-dénué de faiblesses, mais sûr de ses qualités. Mais lorsqu’on entend, sur « God Save La France », « J’ai quitté mon pays / Pour gagner l’élégance », on a envie d’enjoindre le groupe à suivre ce conseil. Histoire de prendre un peu de bouteille, et de faire très attention à se renouveler pour éviter de finir par sonner comme des BB Brunes avec une voix féminine.

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