Ils sont nombreux ses crimes au gars Pierce ! Depuis 1998 et le premier effort de son groupe (composé principalement de lui-même, Mice Parade n’étant qu’un anagramme), l’américain semble beaucoup s’amuser. A bidouiller, triturer, torturer les sons. Le communiqué de presse, inspiré mais mensonger, parle d’une « pop brillante », d’un album qui se révèle écoute après écoute. On l’a donc écouté, et réécouté. Et même un peu plus encore. Et on a le droit de s’interroger. Pourquoi ? Pourquoi tout ça ? Pourquoi se tirer une telle balle dans le pied ? Explications. Ou du moins, tentative.
Ce Candela est un vrai foutoir. Il n’y a pas d’autre mot. Adam Pierce fait un choix simple : ne pas choisir. Au carrefour d’un millier d’influences, le percussioniste opte pour la collision des genres, convoquant au milieu d’un wall of sound shoegaze des sonorités hispanisantes (par exemple). On a aussi, sur « Pretending », une batterie en perte de contrôle (c’est au moins autant énervant que d’entendre le voisin d’open space fredonner un titre sans connaître les paroles) ou un « Warm Hand In Narnia » de clôture sentant bon la jam session alcoolisée. Passons sur le morceau éponyme, rappelant vaguement les pires heures des compilations Buddha Bar (ça donne envie, hein ?). La jolie voix de Caroline Lufkin sert souvent de fil rouge au milieu de ce bordel. Premier single, « The River Has A Tide » donne un bel aperçu. Un chant mal assuré (celui du monsieur, vaguement plus à l’aise derrière ses fûts, c’est dire…) tente un semblant de mélodie sur quelques accords cradingues. Puis, la tempête se calme, et le morceau se fait acoustique, tendre, avec les jolies murmures de Caroline. Mais le calme ne dure qu’un instant, Adam Pierce semblant se complaire dans cette ébauche de style, « The River… » se termine comme elle avait commencée : en eau de boudin.
On entend d’ici le murmure d’une certaine caution « indie » se pavaner devant tant d’ambition. « Nan mais le mec tu vois il va chercher l’inspiration dans la salsa et tout, il ne se limite pas à quatre accords, il va voir ailleurs, c’est fou mec, le type est un total freak ». Et le freak, c’est tellement chic. Mais au-delà de la branlette de façade, peu ou pas de contenu. Ici, le superficiel est roi. A l’image d’un Scott Walker se complaisant dans la médiocrité et récoltant les louanges (il paraît que l’album est « drôle », comme si c’est ce que l’on attendait d’un disque), ce Mice Parade souffre d’un excès de confiance. Il n’est pas le seul dans ce cas-là, mais il est bel et bien le symbole d’un certain état d’esprit. Celui qui emploie le terme « culte » dans tous les sens. Qui ne semble pas voir l’imposture quand elle se trémousse sous ses yeux. Qui se plaît à encenser la minorité invisible parce que justement, elle est en marge d’un mainstream et n’a pas voix au chapitre. Et le talent et la musique dans tout ça ? Des accessoires, tout au plus, au service d’un propos d’une autre époque (celle où l’indie signifiait quelque chose). Comme le disaient les pneus Pirelli : « sans maîtrise, la puissance n’est rien ». En faire des caisses, c’est vrai que c’est rigolo. Savoir ce qu’on fait, c’est mieux. C’est d’autant plus con qu’en grattant un peu la surface, on pourrait trouver quantité de belles comptines. Less Is More paraît-il. La preuve par dix.