Entertainers phares, bons clients pour MTV, artistes générationnels et de Kids dans le vent : on le sait depuis un moment, Ben Goldwasser et Andrew VanWyngarden n’ont jamais aimé qu’on leur colle des étiquettes. Le succès massif de leur premier album était une erreur, un malentendu, comme ils le racontent dans notre récente interview. Des tubes, ils en avaient dans les tiroirs, mais ce qu’ils préfèrent et de loin, ce sont les titres les moins évidents, comme « 4th Dimensional Transition » ou « Future Reflections ». Et qu’en est-il de « Electric Feel » ? « Time To Pretend » ? Des chansons qui appartiennent au passé, documents d’une époque révolue où ces deux gamins innocents se sont perdus dans le star system, frustrés de devoir meubler leurs concerts autour de passages obligés. Il fallait tuer la bête. Il fallait sortir Congratulations, deuxième album plus fourre-tout, moins évident, dénué de classiques immédiats mais rempli de belles choses que seul le temps aura fini par mettre en valeur. Un album important, bien que moins fédérateur. Un ovni de 2010 désormais chéri en 2013 qui n’imposera pas sa pâte dans les charts. Si le succès artistique est total, le public, lui, boude ce truc trop long et pas dansant pour un sou. Mais ça, Ben et Andrew s’en moquent. Ils sont déjà ailleurs.
Mais où sont-ils, exactement ? Loin, très loin dans leur bulle, à la fois gigantesque (et peuplée d’influence, du mouvement psyché originel au dubstep d’aujourd’hui, de Broadcast à Kraftwerk, en passant bien évidemment par Spacemen 3 et Television Personalities) et microscopique (il n’y a de la place que pour deux, après tout). Avec pour seul mot d’ordre : aux chiottes les considérations de leur maison de disques. Pas de gros single en vue, donc. Dans les faits, cela donne un « Alien Days » envoyé en éclaireur pour le Record Store Day, une petite chose bien sympathique, une pop song noyée sous des idées mal ordonnées. Cela donne aussi « Introspection », une reprise de Faine Jade, artiste méconnu actif durant les sixties. est chouette, mais compte tenu des pointures de l’époque, le tout manque clairement de la folie et du génie nécessaire pour se faire un nom. MGMT en fait un objet de culte, le décortique, transforme le tout en une chanson made in Ben & Andrew. « Introspection », gentille mélodie sussurée, tourne en rond autour d’une idée fixe et ne décolle jamais, laissant tout juste imaginer ce à quoi ressemblerait un album contemporain de Simon & Garfunkel.
Et au petit jeu des comparaisons, on peut aller plus loin : « Mystery Disease », c’est « » dans l’intention, mais le résultat n’est ni plus ni moins que du Wu Lyf chiant. On a également le droit à un pastiche du « Money » de Pink Floyd sur « ». Visiblement en roue libre, le groupe ne s’interdit rien, en fait des caisses, ajoute des pistes sonores partout, sature ses basses, impose des nappes de synthés, triture ses mélodies, le tout sans réflexion ni cohérence apparente, autre que celle de tout envoyer balader. Seule rescapée de cet indigeste carnage, « Plenty Of Girls In The Sea », sorte de gentille comptine. Dans ce foutoir rempli d’idées, le duo a donc décidé de ne pas choisir, et en dix titres, d’en condenser trente.
Véritable argument de vente étalé un peu partout dans la presse (comme quoi certains trouveront toujours le moyen de nous vendre des disques), MGMT serait l’album le plus « représentatif » du duo. MGMT, à trop vouloir oublier les hits du passé, en vient à pédaler en sens inverse. Ils font de la musique pour eux, et uniquement pour eux. Sans recul, ni garde-fou. On a le droit de trouver cela couillu, beau ou malin. On a également le droit de trouver cela raté, triste et inintéressant.