« Jacuzzi Boys est un groupe de rock’n’roll originaire de Miami, en Floride, établi en 2007. Clubs – fêtes – mariages – funérailles » : voilà ce qu’annonce sobrement une carte de visite faisant office de porte d’entrée sur le site officiel de ce trio chevelu formé en Floride, dans le paradis des surfeurs body-buildés et des grand-mères péroxydées. Un nom pareil invite à buller, et pourtant, Gabriel (guitare,chant), Diego (batterie) et Danny (se présentant officiellement comme joueur de base-ball sur la page Facebook du groupe, mais soyons réalistes, il en est avant tout le bassiste), offraient depuis leur premier album, No Seasons (2009), un garage rock qui empruntait tout aux classiques du genre : riffs lents et saturés, batteur débutant et chant lancinant, le côté lo-fi et le second degré en plus.
Avec leur dégaine d’Instagrammeurs ayant avalé un skateboard, les trois potes poursuivent leur bonhomme de chemin avec Glazin’, sorti en 2011. Ils y parcourent encore à l’envi les sentiers boueux du psych-rock californien, où l’on s’enfonce parfois (« Crush », la bien-nommée « Cool Vapors », mais surtout « Los Angeles » et « Koo Koo With You » qui ferment l’album). La structure des chansons est déjà un peu plus travaillée : après avoir installé l’air conditionné dans leurs mobile-homes (véridique), le trio avait peut-être les idées un peu plus au frais que pour son premier album. Problème : le coup du groupe garage rock branleur, on nous l’a déjà fait un bon millier de fois. Combien de Demon’s Claws et de The Barbaras pour un seul Black Lips ?
Les Boys nous donnent un début de réponse avec ce troisième album, qui se pose comme le meilleur (et de loin) de leur maigre discographie. Très rapidement, les spécialistes établiront plusieurs parallèles avec les Smith Westerns, et ce dès le solo glam de « Be My Prism ». Autre constat : ils savent désormais lever le pied et apporter de la nuance à leurs morceaux. Mettre en parallèle le foutraque et sursaturé « Rubble » et une balade doucereuse comme « Heavy Horse » sans déséquilibrer l’album, ça demande a) un vrai talent dans songwriting et b) un sérieux travail sur les atmosphères. Et ça se joue toujours sur un détail : la place de la voix sur « Over the Zoom » et « Hotline », le bégaiement sur le refrain du single « Double Vision », le mid-tempo bubblegum assumé de « Dust » ou encore la reverb caractérisée de « Ultraglide ». La variété dans les ambiances nous garde éveillé tandis que l’écriture léchée nous donne envie d’y revenir.
Mais le morceau le plus parlant quant à l’évolution du groupe reste « ». Entre les overdubs de guitare, le solo glam et la production musclée (on entend même un petit synthé, tiens), ils tiennent d’une part un petit hit et, de l’autre, amorcent un nouveau départ dans leur carrière. Ce n’est pas pour rien que l’album s’appelle Jacuzzi Boys. Il aurait presque pu s’appeler Jacuzzi Men tant les floridiens parviennent à transcender leur statut de garage band teubé. On voit tout simplement plus clair dans les chansons simples mais jamais simplistes des trois énergumènes. Envoyer valser son côté lo-fi ne revient pas mécaniquement à remiser son ethos au placard. Et ça, ils l’ont bien compris.