Chroniques

Top albums 2013 #12 Disclosure

À chaque premier album un tant soit un peu audacieux et bien ficelé, on reprend notre houlette de berger et on scande à qui veut bien l’entendre l’émerveillement ressenti à la première écoute, comme si la découverte était trop lourde à porter. Avec Disclosure, c’est un peu ça : voilà des mois que l’on annonçait, à coup de teasers ou autres, le premier album du duo anglais. À tort ? Pas vraiment. Car, pour le coup, il n’a pas fallu beaucoup d’extraits pour nous convaincre du talent précieux de la fratrie Lawrence – en plein été 2010, «  » justifiait déjà à lui seul leur statut de Next Big Thing.

 

Mais avant de parler clairement de Settle, précisons un peu les intentions de Disclosure pour ce premier effort. Car, en bon touche-à-tout, Guy et Howard, disons-le tout de go, n’ont pas confectionné ici un véritable album, contrairement aux excellentes productions de James Holden ou Daniel Avery, sorties cette année également. Et c’est ce qui les différencie: au sein d’une époque où trop de disques se révèlent inégaux, voire longuets. Eux, ne pondent que des tubes et agencent le tout comme une playlist de luxe. On trouve ainsi une pléiade d’intentions pop au sein de Settle, avalant le 2-Step, l’UK garage ou la deep house dans une énergie volontairement dansante. Voilà pour situer l’ambiance, que l’on retrouve de manière assez similaire quoique moins tubesque sur le premier album de Factory Floor.

 

Mais bon, loin de se contenter de ces quelques velléités, ces deux jeunes garçons taillés pour la gloire redonnent avec Settle un souffle et une âme à cette vieille fille qu’est la musique électronique (près de quatre décennies maintenant, si l’on met de côté Russolo, Steve Reich et autres têtes chercheuses). C’est le premier charme de l’album, qui, sous une apparente simplicité, tisse une toile de sons organiques et toniques. Les basses clinquantes et le groove sensuel de « White Noise » (en featuring avec AlunaGeorge) illustrent à eux seuls le potentiel du duo londonien. Ni probable, ni improbable, ce titre, placé au premier tiers de l’album, est tout bonnement inouï. Mieux : il annonce avec talent les digressions r’n’b de Settle – où les rythmiques poisseuses, voire vaporeuses, des titres « Latch » (avec Sam Smith en guest), « Voices »  et « You & Me » (avec Eliza Doolittle) démontrent bien que ce genre revenu au premier plan en 2013 n’excelle que lorsqu’il évolue loin des complaintes pour midinettes à appareils dentaires. Ceux qui soupçonneraient les deux frangins d’avoir cherché à mettre au point une formule opportuniste se trompent donc sur toute la ligne. Leurs melodies ont passé l’été et de nouvelles (très) bonnes compositions – qui plus est – sont venues confirmer un réel talent.

 

Mixé de main de maître par le duo, ce premier album au savoir-faire métronomique et tranchant flatte les tympas de bout en bout (excepté peut-être le sursaturé « Confess To Me »). Pleins de bons sentiments, des titres comme « When A Fire Starts To Burn » et « Grab Her ! » redéfinissent clairement les contours du dancefloor, un lieu que l’on traite trop régulièrement avec vulgarité alors que la subtilité (des beats, des boucles, des instrumentations,…) lui va si bien. Comme si le but ultime de Disclosure était au fond celui-là (qui nous plaît) : créer un très ambivalent sentiment de familiarité sans pour autant s’interdire toutes formes d’expérimentations qui font de l’ensemble une œuvre dynamique, à la fois d’une grande universalité dans sa facture et totalement radicale par ses audaces instrumentales.

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