Chroniques

Cheatahs Extended Plays

Plus qu’un album et comme son titre l’indique, Extended Plays est une accolade : celle des deux EP sortis par Cheatahs en 2012. SANS, daté de novembre, occupe les quatre premières pistes suivi de Coared (mai), qui vient compléter l’ensemble. Fin du point biographique nécessaire mais pas suffisant : Cheatahs a démarré en tant que projet solo du guitariste canadien (résidant à Londres) Nathan Hewitt, membre de la team de punks choupinets Male Bonding. Hewitt, donc, nous fait savoir, huit chansons durant, pour 26 minutes chrono de distorsion appuyée, tout son amour du rock alternatif ricain et du shoegaze britannique époque Guerre du Golfe.

Ça démarre avec le riff ultrapunk de « The Swan », qui se transforme abruptement en un refrain à la Ride. Encore une accolade, tandis que d’autres guitares, encore plus de guitares, forment des espèces de guirlandes mélodiques en sous-main. Divertissant, au même titre que « SANS », grassouillet et « lofaille » comme une bonne tranche de Dinosaur Jr première époque, avec la voix passée sous la reverb qui va bien (tout compte fait, on pense aussi à Hüsker Dü). Recette qui se répète une nouvelle fois sur « Fountain Park », dont l’intro rappelle de très près celle de « Our Plans » de Cloud Nothings. « SANS », « The Swan », « Our Plans », c’est le genre de pépites punchy qui marchera sans aucun problème sur toute une frange de nostalgiques du début des années 90 (ou de ceux qui n’en étaient encore qu’au stade Blédina, comme c’est le cas de votre serviteur). Sans aucun problème, là est le souci : outre la disto savamment mise en branle et la reverb’ plutôt efficace sur la voix, on ne voit pas vraiment le propos du gars Hewitt.

La deuxième partie de l’album, celle de l’EP Coared, est plus cracra que SANS dans la production. Il y a aussi, sur des chansons comme « Jacobi », « Froshed » ou « Ripper » (les trois quarts de l’EP, en fait), une vibe très proche de celle des débuts du shoegaze britannique. Ou des tout de My Bloody Valentine, l’urgence et le côté novateur en moins. Encore une fois : tout est brillamment singé, sans aucune espèce d’apport personnel.

La mention de Cloud Nothings n’était qu’à moitié innocente. Si la bande de Dylan Baldi partage(ait) ce même trip étrange de nostalgie d’une époque jamais vécue, son dernier album a douché tous les doutes possibles : on peut bel et bien faire du rock comme Thurston, J, Frank et Bob sans s’embarquer dans une impasse. Yuck, dans leur genre, ont bien négocié l’obstacle avec certains morceaux absolument imparables. Un souffle et un propos tout neuf, c’est ce qui manque à cet Extended Plays. Affaire à suivre, donc. Cheatahs avait pourtant tout l’attirail : un nom ironico-nihiliste, de bonnes vieilles références et des chansons qui tiennent debout. Sans jamais atteindre la puissance d’un de Cloud Nothings ou l’intensité émotionnelle du de Yuck.

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