Chroniques

Beachwood Sparks Desert Skies

Le rayonnement des Beachwood Sparks s’étend bien au-delà du respectable. Trois albums en douze ans (c’est peu) dont l’excellent The Tarnished Gold, sorti dix ans après les débuts du groupe, auront suffi à faire des californiens les nouveaux rois d’une country à mi-chemin entre pop rock et psyché. Leur musique n’ayant jamais souffert des exigences d’une hype quelconque, les Beachwood Sparks s’en sont toujours tenus à ce qu’ils savaient faire de mieux. À savoir : une musique d’un autre temps, mais jamais passéiste.

Ce qu’il faut savoir au sujet de Desert Skies, c’est que toutes ces odyssées country ont été enregistrées… en 1997, par le sextet originel. Point de départ, aussi déroutant qu’évocateur, pour un album dont on connaît déjà certains des titres (à l’instar de « Desert Skies » ou « Canyon Ride », parus sur le tout premier LP du groupe en 2000, chez Sub Pop). L’objet aurait donc pu servir de prequel à la carrière rayonnante que les membres connaissent depuis leurs débuts. Et le gros avantage de Desert Skies, c’est qu’il nous permet de (re)découvrir ce que Beachwood Sparks a toujours été. En résumé, des bâtisseurs de mélodies country où les guitares, si chères à Gram Parsons, occupent la majeure partie de l’espace. C’est d’ailleurs ce même Gram Parsons qui a entraîné, avec sa participation au sein des Byrds puis The Flying Burrito Brothers, le country rock de la fin des années 60, aux prémices de 70, vers une « cosmic american music ». Période à laquelle la musique traditionnelle américaine était secouée par une quête de modernité.

Ici, les Beachwood Sparks se montrent plus cools que babas, plus bariolés que colorés. Tout en modestie, et avec une certaine classe, Desert Skies se mue en parfait compagnon de route pendant votre traversée (imaginaire ou non) des états de l’ouest ricain. Il est à lui-seul le décor sonore idéal pour un road-movie digne de ce nom. Déjà inventifs il y a seize ans, les Beachwood Sparks accouchent, sans douleur, d’une country novatrice. Le combo d’ouverture, avec l’éponyme « Desert Skies » et « Make It Together », nous trimballe habilement de la pop anglaise, et sa nonchalance magnifique, à un rock country en diable. « Time », ballade délicate appuyée à l’harmonica, vient se lover contre les deux titres précédents. « Sweet Julie Ann » lui fait écho, version technicolor. « Midsummer Daydream » est, quant à elle, le spectre hallucinatoire, parfois pesant, qui plane sur chacune de ses consœurs. Là où les guitares se répondent en permanence.

Si on se laisse prendre au jeu, et si on met de côté l’effet rétroactif de cet album, on peut dire que l’exercice est plus que réussi. Mais Desert Skies n’est pas à prendre comme un travail d’exhumation. Au contraire, il symbolise l’envie d’un groupe de se dévoiler tel qu’il est, ou qu’il a été.

Le seul problème, s’il fallait en trouver un, serait cet étau entre présent et passé dans lequel on se retrouve piégé. Peu d’indications sur l’attitude à adopter pour appréhender l’album. Mais en faut-il vraiment une ? Est-ce vraiment nécessaire ? L’ennui, ce sont toutes ces questions que l’on vient à se poser sur ce retour vers le futur. Pourquoi aujourd’hui et maintenant ? Desert Skies n’étant ni un best of, ni une réédition à dessein commercial, on s’interroge sur le devenir du groupe. Desert Skies aurait-il pu ouvrir une autre voie à Beachwood Sparks ? Aurait-il permis à la formation de s’affirmer plus encore et d’approfondir les recherches entamées à l’époque ? Peu importe, on se contentera de se dire que Beachwood Parks fait partie de ceux sur qui le temps n’a aucune emprise.

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