Il s’appelle Asaf Avidan. Passeport israélien, né il y a 33 ans. Métier : auteur et compositeur. Il traîne dans les parages depuis 2000, publiant à intervalles réguliers des EP’s et des albums recevant un accueil critique sympa et se vendant un peu au-delà de la maison familiale. Sous le nom de Asaf Avidan & The Mojos, la petite bande tourne, tourne, tourne. Aux côtés de Lou Reed et, heu… Ben Harper. Parvient à se forger une jolie réputation dans les festivals. Puis, l’annonce tombe : après une ultime tournée, le groupe entame une « pause créative indéfinie ».
Cette pause créative, à l’écoute du premier album d’Asaf en solo, semble toujours être d’actualité. Entendons-nous bien : loin de nous l’idée de se plaindre des accès de facilité qu’ont certains à planquer des ébauches de chansons sous des couches de style, et ce sans mettre en avant un certain sens du songwriting (quand même bel et bien présent sur ce disque. Vous suivez ?). Le mec sait ce qu’est la pop, il connaît certains de ses artifices de fabrication. Ce Different Pulses ne manque pas de refrains (celui de « Setting Scalpels Free » est particulièrement efficace). Le problème se situe ailleurs.
Tout d’abord dans cette espèce de fausse sobriété qui habite l’album Ici, tout ressemble à de la folk : l’omniprésence de la guitare acoustique, ces quelques notes mal ajustées, ce chant plaintif, lancinant. Ça en a presque le goût, presque l’odeur. Pourtant, la production est horriblement léchée. D’une propreté impeccable. Rien ne dépasse. Tout est tellement parfait, qu’on finit par ne plus attendre quoi que ce soit, que l’on n’entend rien. Ce manque de fraîcheur et de simplicité ôte toute l’âme, tous les défauts qui ferait de Different Pulses un bel album. Pur effet de style, cette attitude intimiste ne sert qu’à mettre en avant une voix. Ha, cette voix ! Que l’on compare à Robert Plant (il ne faut pas déconner) ou… à Janis Joplin.
Oui, Asaf aurait la voix de Janis. La belle affaire. Janis Joplin aussi avait la voix de Janis Joplin, elle ne se reposait pas là-dessus pour autant. Et surtout, n’essayait pas de faire étalage de toute sa technique : ici, tel un candidat de la Nouvelle Star donnant tout ce qu’il a pour Dédé-le-monosourcil, Asaf s’époumone, nous offre de grandes envolées super stylées, parce que cette voix, tu comprends… Et il a beau s’envoler pour une autre époque (les sixties, sur « Thumbtacks In My Marrow ») ou faire simple dans la forme, adoptant l’équation 1 Guitare + 1 Voix + 1 Refrain + 1 Couplet (« Love It Or Leave It »), pas moyen d’arriver à autre chose que de longues complaintes de chat égorgé. Comme une vieille hurlant à la lune, Asaf souffre tellement. Janis savait s’arrêter, Robert avait un Jimmy Page à ses côtés… Asaf, désespérément seul, n’a pour lui qu’une voix de castrat mal dans sa peau. En live, c’est crispant. Sur disque, on préférera encore une compilation de bruits de portes qui grincent plutôt que ces longs râles interminables. Sinon, la pochette est moche. Et estimez vous heureux, on vous épargne les innombrables jeux de mots (ce qui n’était pas Avidan).