Les Dum Dum Girls, blouson en cuir et démarche féline

Sonorités cold wave et romantisme lumineux : à l’écoute de Too True, nouvel album des Dum Dum Girls, il nous semble loin, très loin, le temps où, comme un chewing-gum, venaient s’accoler au groupe les références aux girl-bands des sixties. Après un album de transition, Only in Dreams, qui rappelait toute la frange pop rock sensible des nineties anglaises (la vague C86, du nom des compiles NME sur cassettes de l’époque) le nouveau bébé de Dee Dee relève la sauce en explorant un nouveau pan de l’histoire musicale anglaise. On y trouve le romantisme et les ambiances sous écho de la new-wave et du post-punk. Blouson en cuir et démarche féline.

 

Sur album et en promo, Kristen Gundred, chanteuse et seule compositrice du groupe, semble encore un peu plus affirmer son rôle de front woman. Mais en interview, ce qui frappe d’emblée est la dualité entre Kristen et Dee Dee, son alter-égo scénique. La sensibilité à fleur de peau de la première contraste avec la confiance maintenant toute en sensualité, toute en théâtralité, de la seconde. Une timidité réelle, apparemment en phase de rémission : sa créature publique se révèle, comme finalement souvent dans l’histoire de la pop, être une bonne forme de thérapie. Quand nous débarquons pour l’interviewer dans la salle de réception d’un hôtel parisien, elle est allongée sur un divan à envoyer des textos à son mari.

 

 

La création de cet album a été interrompue parce que tu t’étais flinguée la voix en tournée. Tu n’as pas eu peur de devoir tout arrêter ?

 

Si, j’étais terrifiée. Jusque-là je n’avais jamais vraiment fait d’efforts pour chanter comme je le voulais, à part quelques petits trucs, comme arrêter de fumer par exemple. Là c’était devenu impossible et je me suis interdite de réfléchir à l’éventualité de ne pas récupérer ma voix. Maintenant, il faut d’ailleurs que je prenne le temps de réfléchir à comment mieux l’entretenir afin de ne pas finir comme certains artistes obligés d’arrêter à force d’avoir trop tiré sur la corde.

 

Cette expérience-là a-t-elle changé quoi que ce soit dans ta manière d’aborder le chant ?

 

Pas directement en terme de mélodies, puisque les démos pour l’album étaient déjà bouclées, mais ma convalescence m’a permis de retravailler certaines chansons. Cela ne m’était jamais arrivé auparavant mais, à ce moment-là, j’étais beaucoup trop stressée pour me retrouver en studio. Le problème physique avait finalement fini par m’atteindre psychologiquement. J’ai donc décidé d’attendre un peu, d’acheter du matos et de monter un studio chez moi, à New York. C’est donc là que j’ai réenregistré les voix, libre de tout engagement. Cela m’a pris beaucoup de temps, un couplet à la fois, car je devais faire attention à ne pas ruiner pour de bon mes cordes vocales. Mais au final je pense que ça a vraiment servi l’album. Si cet accident ne m’était pas arrivé, Too True aurait été très différent. Je sais, c’est un peu le cliché, mais bon…

Ce nouvel album dévoile une facette de toi un peu plus « dramatique », dans la place de ta voix dans tes chansons. Tu cites même la très théâtrale Siouxie en référence. Est-ce qu’on peut dire que tu es plus à l’aise avec ton chant, avec ton statut de front woman ?

 

J’ai toujours été fan de Siouxie mais c’est vrai que mon style de chant était vraiment différent au début des Dum Dum Girls. C’est probablement dû au fait que je commençais tout juste à écrire, chanter et enregistrer mes propres chansons. Même si ça me plaisait je sens maintenant qu’à l’époque j’installais intentionnellement des barrières de sécurité entre ma musique et ma voix en mixant par exemple très bas mon chant. D’ailleurs, à chaque nouvel album, mon ingé son augmente en douce le volume de ma voix…

 

Même côté clip et pochette d’album, on voit que tu te mets plus en avant.

 

Pour le clip de « Lost Boys and Girls Club », cela a plus tenu à la personnalité du réalisateur. Mais c’était approprié, Too True est le premier album où je n’ai plus d’inhibitions. Je ne me sens plus intimidée à l’idée de m’exposer. Après, avec toutes les merdes que j’ai vécu dernièrement – essayer de surmonter cette impossibilité de chanter et tous les autres coups durs – j’ai ressenti un désir complétement nouveau d’affirmer ma voix. Too True est définitivement mon album le plus direct.

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