Quand nous le retrouvons, posté dans un bar du 18ème arrondissement parisien, Dylan Baldi ne ressemble pas vraiment à sa musique. Il lit sagement, un verre de rouge au bout des lèvres. On pourrait facilement le méprendre pour un étudiant à la Sorbonne, et surtout pas pour l’indie-kid névrosé, cynique et sans espoir qui plane sur Attack On Memory, son dernier album. On l’imaginait carburer au speed et à la bière. Ce que l’on ignorait, c’est que Baldi vit à Paris depuis deux ans et sa rencontre avec une prof de français lors d’un concert de son groupe Cloud Nothings au Point Ephémère. Après quelques considérations linguistiques sans grand intérêt, on rentre dans le vif du sujet. Parce que Paris est la ville où la majeure partie des chansons du nouvel album de Cloud Nothings, Here and Nowhere Else (sortie le 1er avril, d’ores et déjà en écoute intégrale chez ), ont été écrites, la capitale occupe une bonne partie de l’entretien. Après Attack On Memory, son album de la dernière chance (« personne ne venait aux concerts », lance Baldi), on a voulu comprendre l(e non)’attachement de Baldi à Paris, à quoi ressemble sa vie si loin de Cleveland, et les divers bouleversements de la vie du bonhomme.
Ce fut une petite surprise, d’apprendre que tu vivais à Paris. Comment ça se fait ?
C’est le cas pour le moment. J’ai suivi ma copine, qui est française. Bretonne, pour être plus précis. Et oui, j’habite ici la plupart du temps depuis environ deux ans. J’ai emménagé chez ma petite amie dans le 18ème arrondissement, métro Jules Joffrin.
À quoi ressemble ta journée-type à Paris ?
Je me réveille après que ma copine soit partie au boulot, et puis je fais la même chose que si j’étais à Cleveland, mais à Paris. Je me promène beaucoup, mais dans un endroit bien plus cool que Cleveland, où il y a vraiment des choses à voir. Et les weekends, quand elle ne travaille pas, on va voir des concerts, tout ça. Je mène une vie plutôt normale.
Tu te considères comme un parisien maintenant ?
Non. Je dois d’abord apprendre le français. Je n’ai pas le niveau pour discuter avec quiconque, je peux prendre commande dans un restaurant, dire bonjour à quelqu’un, mais après ça je suis un peu bloqué. Je ne prends pas de cours et pourtant, ma copine est prof de français. J’apprends en vivant ici, en écoutant les gens parler. C’est facile de vous comprendre, mais c’est autre chose de savoir comment vous répondre.
Tu t’intéresse à la musique française, au cinéma ?
J’aime un peu de musique française, des trucs plutôt vieux. Je ne trouve pas grand chose chez les artistes plus récents. J’aime beaucoup Serge Gainsbourg, et aussi Brigitte Fontaine… surtout son album qu’elle a fait avec l’Art Ensemble of Chicago. Côté cinéma, c’est comme la musique, je n’aime pas tellement les trucs modernes, mais j’aime tout ce qui est Nouvelle Vague, Truffaut, les films génériques que tout le monde connaît. J’aime le cinéma étranger, plus que l’américain, en général. En revanche je regarde un peu la télé française, et je dois avouer que j’ai bien aimé Koh-Lanta…
Hein ?
Ce n’est plus diffusé là, non ? Quelqu’un est mort, c’est ça ? Mais j’ai regardé la première fois que je suis arrivé, ma copine et ses amis se sont réunis, on a bu et on s’est mis Koh-Lanta. C’est la seule manière de le supporter, non ? J’ai même un jeu de société Koh-Lanta ! Je n’y ai jamais joué, mais ça fait joli sur l’étagère.
Comparativement à Cleveland, c’est comment, Paris ?
Ça n’a rien à voir avec Cleveland ! Paris est une grande ville, c’est comme aller à New York. Il semble y avoir un stéréotype partout, sur comment à Paris les gens sont méchants, toujours énervés, mais ça ne m’a pas l’air vrai. Je pense que c’est comme beaucoup de gens, on arrive ici en s’attendant à ce que tout le monde parle anglais, alors qu’au final ce n’est pas le cas. J’aime Paris, c’est plus joli que Cleveland, c’est comme un grand musée. À Paris tout est vieux, bien préservé. Dans une grande ville moderne, tout semble vivant, mais ici, on a parfois l’impression de vivre dans une autre époque. J’aime aller à un endroit et me dire « oh ça a été construit il y a 50 ans ». Mais je n’habiterais pas ici si je n’étais pas avec ma copine.