La claque du partage : musique pour tous
Traverser ces pays permet parfois de se confronter à des « musiques traditionnelles résultant parfois de la convergence passionnante des cultures européennes, africaines et amérindiennes ». En tout cas c’est ce qu’annonçait le programme d’un festival parisien sponsorisé par Télérama il y a quelques années. Ce qui ne se confirme pas toujours même s’il est vrai que le patrimoine musical est partout foisonnant. En plein Nordeste Brésilien comme au fin fond de l’Argentine, les habitants se montrent également toujours généreux dès qu’il s’agit de partager leurs traditions musicales. Il n’est ainsi pas rare qu’en mangeant sa soupe de frites à dix bolivianos (environ un euro) en pleine Bolivie l’on assiste à des spectacles aussi improbables que « la fête de la fertilité du lama » où les danseurs, qui n’ont manifestement pas carburé qu’à l’eau plate, chantent tout en mimant la reproduction de ces animaux.
Dans un autre style, à Cafayate, bourgade pépère de la province argentine de Cordoba, les rues sont sillonnées toute la journée par un groupe de papys à mobylette armés de leurs batteries et accordéons, s’arrêtant seulement pour faire le plein de bières, brancher une blonde – espèce rare dans le coin -, et jouer leur Cuarteto, musique traditionnelle régionale.
Pour essayer de vous mettre à l’aise, les barmen se sentent parfois obligés de changer subtilement de style musical une fois repérée votre bonne bouille de français. Il n’est pas rare de les voir passer quelques joyeusetés hexagonales type M ou Jean-Louis Aubert, quand ce n’est pas l’intégrale de Manu Chao qui se met soudainement à résonner en boucle.
La claque du partage bis : des gens parfois (un peu) trop partageurs
Un sound-system « minimaliste » pour une pool party dominicale aux abords d’une favela
Alors qu’en Europe, le casque audio à 300 euros est devenu le signe rutilant d’un pouvoir d’achat mis au service du dernier mp3 à 128 kpbs de Rihanna, cet accessoire, même dans ses versions moins onéreuses, ne semble pas encore avoir conquis les terres d’Amérique du Sud. Les très longs périples en car pour traverser le Brésil ou l’Argentine s’en ressentent d’ailleurs fortement, incluant régulièrement l’option non négociable du « réveil en pleine nuit par l’antique transistor du voisin », crachouillant la musique de son groupe local favori. Peu enclins à la confrontation, les autres passagers se contentent généralement de répondre en augmentant le volume de la musique sur leur téléphone.
Au casque, un peu trop solo, les habitants préfèreront finalement toujours la bonne vieille enceinte-armoire-à-glace à caler à l’avant de sa mobylette ou sur le toit de sa maison. Plus convivial. Je pense à ce jeune couple s’embrassant sur un banc public aux abords la place principale de Sucre, Bolivie, enivré par la bafle surpuissante sortant du coffre d’une bagnole et un slow d’Aerosmith tiré de la BO d’Armageddon. Attention aux oreilles sensibles, certains coins vous donnent l’impression de dormir sur une banquette entre deux dancefloors aux musiques désynchronisées finit par être quelque peu lessivante.