C’est quatre mecs. Quatre tronches de cake qui, comme un bon million de tronches de cake avant eux, décident de monter un groupe. Leurs centres d’intérêt, pensent-ils, font d’eux des gars à part. Max, Elvis, Zac et Brandon, voyez, aiment le punk, le skate, la weed, la bière et, euh, bah ils aiment aussi faire les quatre en même temps. Après trois ans à écumer les house-parties de Los Angeles et de ses alentours, ils passent aux choses sérieuses : une signature chez Wichita Recordings (Best Coast, Cloud Nothings, Les Savvy Fav, toussa toussa) et surtout, un album.
Il y a déjà ce nom, le meilleur nom de groupe (en compétition avec Foxygen) à avoir vu le jour ces dernières années : FIDLAR, pour « Fuck It Dog, Life’s A Risk ». Comme nous l’a raconté Zac Carper, le chanteur du groupe, un lendemain de cuite lors de leur dernier concert parisien (entre deux lampées de vodka à 11h du matin) : « FIDLAR, c’est ce que les skaters californiens se balancent avant de réaliser un trick ». Lampée de vodka. « Un truc pour se motiver, tu vois ? On l’utilise aussi dans la vie de tous les jours, mais un conseil… jamais en voiture ». Nos quatre tronches de cake ressemblent à leur musique : dépenaillés, souriants, excités.
Musique, donc. Ça part clairement dans tous les sens, dans un espèce de petit précis foutraque de l’histoire du punk. On y trouve autant du Cramps et du Ramones que du Blink 182, du Hives, du Gun Club, du Black Lips, du Descendants (NB : le guitariste et le batteur sont les fistons de Greg Kuehn, clavier du groupe de punk hardcore T.S.O.L). Ou autant de manières de beugler son nihilisme dans un micro, ou de s’écorcher les doigts sur les cordes d’une guitare sans raison apparente. Et si eux, ça leur fait du bien, nous, on en pense quoi ? D’une manière générale, FIDLAR est un trip très fun. Les chansons sont remplies à ras-bord de… trucs : ils enfoncent autant d’idées que possibles dans un même morceau, ce qui les transforme invariablement en joyeux bordel. Et surtout, grâce à bientôt quarante ans d’histoire du punk derrière eux, la palette est assez variée. On a droit à du punk très lourd sur « Whore » ou « Stoked and Broke », une espèce de pop-punk légère et sautillante (Wavves, si tu nous regardes) dans des morceaux tels que « No Waves » (tiens) et « Max Can’t Surf » (assez marrant, l’idée du groupe qui se paie ouvertement la tête de son batteur incapable d’accrocher la moindre vague). Sans oublier un garage-rock ascendant Black Lips sur « Blackout Stout » et « Gimmie Something ».
Cet espèce de nihilisme gentillet de skater défoncé, on le retrouvait déjà sur les trois premiers albums d’un certain Nathan Williams, a.k.a Wavves, un voisin (de San Diego). Avec des thèmes aussi variés que la haine de soi, la consommation de bières peu onéreuses (car « tu comprends, nous sommes fauchés » – Zac Carper), la couleur de cheveux de leur batteur -encore lui- qui a eu la malchance de choper le gêne du blond vénitien. Ça prend ou ça ne prend pas, et passé trente ans, peu de chances que quiconque trouve un intérêt à FIDLAR. Un album qui, s’il n’apportera rien à l’histoire de musique, a le don de foutre une ambiance assez sale dans la pièce qu’il occupe. Et après tout, que demandait-il de plus ?