Si en 2011 la grande majorité de leurs chansons permettaient d’assurer quelques pas de danse épileptiques, on ne trouve plus chez We Are Enfant Terrible la moindre raison d’esquisser quelque mouvement. Sans surprise, on s’installe dans la continuité de leur précédent effort, Explicit Pictures, sorti en 2011. Mais une continuité toute relative. Comprendre : Carry On est un disque brouillon. Parce qu’écrit dans l’effervescence de leur tournée, il symbolise leur éloignement des dancefloors. Et faute de mieux, ils adoptent une posture romantico-dramatique, cynique et nonchalante à la Blonde Redhead. Sans l’écriture ni l’explosivité, hélas.
Le trio est en retard, et le tout ressemble à la vague pseudo art-punk qui a déferlé sur l’Angleterre après l’arrivée des Klaxons. En cause : une mollesse évidente à tous les niveaux. Les lillois sont incapables d’offrir mieux que de la pop à synthétiseurs générique, tantôt évasive, rarement sexy. Enfermé dans la caricature d’un genre, le trio semble ne même pas chercher à s’en extirper. Mou, donc, mais aussi souvent carrément disgracieux. Passons sur l’accent anglais des chanteurs, mais le refrain de « Proud As Punch » est une insulte. Et sur l’inutilement répétitif « Pinup Butter », outre le jeu de mot fumeux du titre et derrière le simplisme de façade, impossible de décéler une once d’attitude ni la moindre bonne idée dans l’écriture. D’influence Beastie Boys, « Who’s Dressed ? », et sa mélodie de voix pompée au « Purple Stain » des Red Hot, essaie de conjurer des images violentes de fin de soirée. Trash dans la forme, incroyablement conventionnel sur le fond.
La production est à l’image de ce que nous venons d’évoquer. Ça crie, ça crache et ça croule sous des effets de manche déjà éculés en 2009. L’ensemble ne montre aucune profondeur, que des resucées. L’effet de superposition des pistes réduit l’espace, que l’on cherche pourtant dans les recoins de petites chansons en mal de créativité. En nous laissant devant le fait accompli, sans possibilité de recul ni de contemplation possible, WAET force le malaise. S’en ressent le faible potentiel de titres qui ont vraisemblablement une cible sans jamais l’atteindre. On a l’impression qu’ils essaient de donner une dimension arty à des morceaux qui ne dépassent pas le degré d’inventivité d’un groupe comme les Ting Tings (qui ont au moins la lucidité de ne pas chercher plus loin que le divertissement des dancefloors).
Quand Explicit Pictures était hédoniste sans tenter de révolutionner quoi que ce soit, Carry On est l’oeuvre d’un groupe qui cherche à se donner une légitimité artistique. Leur pop électronique bleu, blanc, rouge a désespérément besoin de moelle. Ils l’ont bien compris, mais sont-ils seulement capables de la lui apporter ? Tout comme on ne choisit pas de faire de la musique par hasard, on déplore que les cancres n’aient rien de plus à dire et se cantonnent au fond de la classe.